L’impact de l’intelligence artificielle sur le travail
De nombreux débats ont lieu sur l’avenir du travail face au développement de l’Intelligence Artificielle : combien de métiers seront touchés à un horizon plus ou moins proche, avec quelles conséquences (Frey et Osborne, 2017) ? Mais, en fait, de nombreux métiers connaissent déjà de grands changements dus à l’IA. Ce sont ces perspectives actuelles que nous souhaitons interroger à travers cet atelier rassemblant considération théoriques et surtout exemples pratiques.
Lundi 21 mars 2022, de 14h à 17h
Ecole normale supérieure
Salle de séminaire du département de sciences des données
(3e étage, couloir entre les escalier B et C)
45 rue d’Ulm, 75005 Paris
Entrée libre, sans inscription
Programme
14h-15h : Antonio Casilli (Télécom Paris / EHESS) : « Une approche de bout-en-bout de l’éthique de l’IA : les dimensions socio-économiques de la production et du déploiement de l’automatisation »
Résumé : Le débat contemporain sur l’IA éthique épouse les intérêts et les valeurs des producteurs de solutions automatiques, principalement situés dans les pays du Nord ainsi que dans certains pays émergents. En tenant compte des apports des sciences sociales du numérique, cette présentation propose une “approche de bout-en-bout” de l’éthique de l’IA, et met en avant une technologie socialement responsable et écologiquement durable. Son objectif est d’élargir la portée de la recherche actuelle pour inclure l’étude systématique des contextes sociaux, économiques et environnementaux de la production d’IA. En particulier, nous proposons de prendre en compte l’extraction des ressources naturelles et le travail d’annotation et d’enrichissement des données nécessaires pour entraîner, valider et parfois même imiter des systèmes d’IA. Une IA éthique de bout-en-bout vise à promouvoir l’autonomie et à défendre la dignité des travailleurs invisibles de l’IA, principalement situés dans les pays du Sud.
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15h-15h45 : Thierry Poibeau (CNRS, ENS/PSL & Institut 3IA Prairie) : « Comment la traduction automatique a bouleversé le métier de traducteur »
Résumé : Les outils de traduction automatique (TA) sont longtemps restés très imparfaits, et les tentatives d’utilisation en milieu professionnel étaient au mieux partielles et expérimentales. La situation a changé depuis quelques années, avec l’avènement des méthodes neuronales qui ont permis d’obtenir des traductions de qualité acceptables dans différents langues. Cette évolution a eu un impact important : une partie des traductions en milieu professionnel est aujourd’hui effectuée de manière automatique, et un nouveau métier est même apparu : celui de post-éditeur, qui consiste à corriger à la marge les traductions effectuées automatiquement. Nous examinerons les conséquences de cet état de fait : conséquences sur la qualité, les coûts et la situation des traducteurs professionnels. L’influence de la TA est-elle uniquement négative pour les traducteurs professionnels ? Ouvre-t-elle malgré tout de nouvelles opportunités ? Nous essaierons de répondre à ces questions lors de l’exposé, qui permettra d’aborder l’influence de l’IA sur des professions intellectuelles, que l’on pensait protégées de ce type d’évolution jusqu’à récemment.
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15h45-16h : Pause
16h-17h : Discussion : l’IA et le travail, comment assurer formation, égalité des chances et diversité ?, avec Tanya Perelmuter (fondation Abeona) et Laure Bourgois (entrepreneuse, directrice de Codataschool)
Télécharger la présentation de Tanya Perelmuter
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Biographies des intervenants
Laure Bourgois est docteure en Intelligence Artificielle, experte en IA Symbolique et simulations numériques. Après 17 ans d’expériences en R&D (Orange Labs, IFSTTAR …), elle a fondé en 2017 Codataschool (organisme de formation certifié spécialisé en IA et Big Data), avec pour objectif de fédérer les spécialistes de l’IA pour une école d’informatique qui privilégie la créativité et l’éthique.
Antonio A. Casilli est professeur de sociologie à Télécom Paris, école d’ingénieur des télécommunications de l’Institut Polytechnique de Paris. Il est par ailleurs chercheur associé à l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS). Il coordonne l’équipe de recherche DiPLab (Digital Platform Labor) et est l’un des fondateurs du INDL (International Network on Digital Labor).
Tanya Perelmuter est cofondatrice et directrice de la stratégie et des partenariats de la Fondation Abeona. Elle dirigeait auparavant les partenariats chez Riskdata, une plateforme fin-tech. Tanya est une experte en technologies des données, avec un intérêt particulier pour les risques et les opportunités créés par l’innovation dans l’intelligence artificielle. Elle est rapporteure générale d’un rapport de l’Institut Montaigne sur les biais algorithmiques. Tanya est titulaire d’un diplôme d’ingénieur de l’Université de Columbia, et d’une certification en science des données de l’École Polytechnique.
Thierry Poibeau est directeur de recherche au CNRS, affecté au laboratoire LATTICE (CNRS, ESN/PSL & U. Sorbonne nouvelle). Il est également titulaire d’une chaire au sein de l’institut 3IA Prairie. Il est spécialiste de traitement automatique des langues naturelles et s’intéresse aux conséquences de l’usage grandissant des techniques d’IA sur la société.
Référence
Frey, C.B. and Osborne, M.A., 2017. The future of employment: how susceptible are jobs to computerisation?. Technological Forecasting and Social Change, 114, pp. 254-280.